jeudi 30 novembre 2006

Ben Laden chute à Amman

Des nouvelles de notre ami Djamel Al-Bana: il persiste et signe. Le livre qu'il compte publier prochainement au Caire s'attache à réfuter la peine de mort infligée aux apostats. Le magazine Elaph l'a interviewé la semaine dernière à Dubaï. Le frère cadet de Hassan Al-Bana revient sur des points de vue qui suscitent encore la controverse et la polémique. Le penseur égyptien, décidément en verve, enfonce le clou en réitérant ses idées concernant le droit de la femme à exercer le sacerdoce d'imam.
Il estime que le refus de ce droit est une forme de ségrégation sexiste. Concernant le hidjab, il déplore que "le monde entier soit tourné vers des problèmes de puissance et de sciences alors que nous ne pensons qu'à ce petit morceau de tissu pour en couvrir les cheveux féminins. Et si la femme ne couvre pas ses cheveux, c'est le branle bas de combat et c'est l'Islam qui est déshonoré. Ce sont des sornettes sans intérêt et il y a des dames sans hidjab qui sont les meilleures représentantes de l'Islam". Djamel Al-Bana développe encore son opinion sur l'apparition des compagnons (du Prophète) et des khalifes dans des films cinématographiques. Ils ne sont pas immaculés, dit-il, et je ne vois pas pourquoi on ne les montrerait pas au cinéma. Al-Bana estime que le débat actuel en Occident est un signe encourageant pour les cinéastes arabes. Comme il a la dent dure contre certains personnages, il suggère même de consacrer le prochain film à Muawiya. "Si Muawiya, fils de Abou-Soufiane (1) avait été stigmatisé en l'an 40 de l'hégire pour avoir transformé la khalifat en monarchie absolue, jusqu'à nos jours, ça n'aurait été que justice", affirme-t-il. Concernant son prochain livre, il traitera, entre autres, des penseurs actuels égyptiens et de leurs réserves à l'égard de la liberté religieuse (article 18 de la Déclaration universelle des droits de l'homme relatif au libre choix religieux). Les plus grands penseurs chez nous sont des fondamentalistes qui n'arrivent pas à se libérer de l'emprise du "salafisme". Alors que nous disons qu'il n'y aura aucun progrès sans passer outre le "salafisme". Lorsque chaque musulman se rattache l'un des quatre rites et prend pour argent comptant les paroles des exégètes et des rapporteurs de "Hadiths", il ne peut avoir de renouveau". A l'instar du Syrien Mohamed Shahrour, Djamel Al- Bana pense qu'il faut d'abord réformer la religion. "La réforme de la religion est plus importante que la réforme politique, dit-il. Elle s'attache d'abord à réformer l'homme et c'est, en sens, qu'elle est profitable à la politique. Même si la politique est bonne, que peut-on faire d'un homme paresseux qui ne pense pas et dont la conscience est tournée exclusivement vers l'adoration religieuse ? A partir du moment où cet homme pratique la prière et le jeûne, il peut être opportuniste et menteur et aucune réforme politique ne pourra le changer". Ces propos me font penser à l'insoutenable cynisme des députés islamistes qui ont défié le peuple jordanien en rendant hommage au terroriste Zarqaoui. Sous la plume de Ahmed Abou- Matar, le quotidien qatari Al-Raya ironise sur la fetwa des quatre "élus" confiant les clés du paradis à Zarqaoui. La provocation a atteint son paroxysme, selon notre confrère, avec la fetwa de l'un des islamistes-zarqaouistes, Mohamed Abou Fares. "Cette fetwa complémentaire que le député a sortie de sa caissette personnelle octroie à Zarqaoui les qualités de chahid, de Moudjahid (2) et d'intercesseur, dans son Au-delà, pour soixantedix personnes parmi les membres de sa famille et ses amis." "Evidemment, ironise Ahmed Abou Matar, il ne nous éclaire pas sur les fondements théologiques de ce chiffre de soixante-dix dont je n'ai trouvé trace nulle part dans les livres. Ce qui m'amène à penser qu'il a choisi le chiffre de soixante-dix pour qu'il soit supérieur d'une dizaine aux soixante innocents que le criminel a assassinés dans les explosions de Amman (3) le 9 novembre 2005." Le journal cite également la réaction de l'avocat et député jordanien Abdelkrim Deghmi qui somme le mouvement des Frères musulmans (dont sont membres les quatre trémulants) de prendre clairement position. Il dénonce à son tour l'apparition d'un courant dominant dans la mouvance islamiste qui procède par l'anathème et forment des gens comme Zarqaoui. "Cette tendance extrémiste est influente au sein des organisations islamistes dans plusieurs pays arabes, souligne-t-il. Sinon, comment expliquer autrement ces propos du leader des Frères musulmans d'Egypte, Mehdi Akef : “Toz à l'Egypte, au père de l'Egypte et à tout ce qu'il y a en Egypte.” Dans un autre entretien, ajoute Abdelkrim Deghmi, il a prétendu que "le peuple égyptien était prêt à donner des coups de pied aux opposants des Frères musulmans". Ce courant qui sévit dans tout le monde arabe est le plus dangereux pour nos sociétés. On a vu les malheurs qu'il a provoqués en Algérie. Il tente encore, de temps à autre, d'imposer les mêmes méthodes en Arabie saoudite, en Egypte et dans d'autres pays", conclut le parlementaire jordanien. La réprobation suscitée au sein de la population jordanienne par l'attitude des quatre députés islamistes s'explique sans doute par la baisse de popularité de Ben Laden dans ces contrées. Un sondage réalisé par l'institut américain "Pew Global Attitude Project" (http://pewglobal.org/ ) le confirme, en tout cas. Ce sondage, rendu public jeudi dernier, montre, en effet, que le capital de confiance dont jouissait Ben Laden dans les pays musulmans est en régression. Cette régression est particulièrement significative en Jordanie où Ben Laden a dégringolé de 60% à 24% de cote de popularité. En Egypte, en Turquie et en Indonésie, les opinions sont majoritairement partagées entre "peu de confiance" et "pas de confiance du tout". Par contre, le Pakistan et le Nigeria, connus pour avoir des opinions publiques extrémistes, sont en majorité pour le chef d'Al-Qaïda (l'Algérie n'est pas citée dans le sondage). Autre élément qui ne constitue guère une surprise : la majorité en Indonésie, en Turquie, en Jordanie, en Egypte ainsi que 56% des musulmans de Grande- Bretagne ne croient pas que les attentats du 11 septembre 2001 contre les Etats-Unis ont été commis par des Arabes. Ce qui nous conduit à parler de l'autre aspect du sondage qui concerne la façon dont les musulmans voient les Juifs. 99% des Jordaniens, 98% des Egyptiens et 94% des Pakistanais ont une opinion négative des Juifs. De plus 28% des Jordaniens et 22% des Egyptiens considèrent que les Juifs sont la cause des mauvaises relations entre les musulmans et l'Occident. Cela, bien entendu, sans que la question leur ait été posée sous cet angle. En attendant le prochain sondage, nos écoles et nos mosquées continuent imperturbablement à distiller le bon message, que ce soit sur le terrorisme ou sur les rapports avec les Juifs.A. H.

(1) Abou Soufiane conduisait la coalition contre le Prophète. Il s'est converti quand il a vu que tout était perdu. La féroce Hind, son épouse, s'est, elle aussi, convertie. C'est le couple "marsien" de l'Islam. Ils ont poussé leur fils jusqu'au trône et, aujourd'hui encore, ils sont parmi nous.

(2) Une question taraude mon esprit et sans doute le vôtre: comment seront traités les "moudjahidine" qui assassinent actuellement nos soldats et nos policiers ?

(3) Sur Al-Jazira, toujours, un "douktour" islamiste, hôte d'un pays de "kouffars", a affirmé que l'erreur de Zarqaoui a été de tuer des Jordaniens. Ce qui a amené les services jordaniens à contribuer à sa perte. En somme, s'il s'était limité à massacrer des Irakiens, il aurait poursuivi encore sa carrière de boucher. Les experts d’Al-Jazira ont décidément une explication à tout.

Le soir d'Algérie Ahmed Alli http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2006/06/26/article.php?sid=40303&cid=8

1 commentaire:

Anonyme a dit…

merci pour intiresny Dieu