Le vent de la réconciliation souffle partout entre les hommes de bonne volonté. On pourrait même dire qu'il décoiffe, ce vent, si les hidjabs ne poussaient pas, drus, sur son passage. Le père Noël réconciliateur en a plein sa hotte et aucun refus ne sera accepté. Réconciliateurs et éradicateurs sont enfin unis sous la bannière d'un Islam pur et dur, pourvoyeur de mandats multiples. Comme dans l'Irak de Hadjadj Ben Youssef, aucune tête ne doit dépasser, surtout si elle est féminine et que les cheveux sont visibles.Les laïcs frileux se cherchent une tenue plus seyante pour la période sans qu'ils aient besoin de retourner leurs vestes. On les voit déjà s'entraîner au "qamis" et au "Nisf-Essaq" (pantalon à mi-mollet) le vendredi. Il suffit d'un signal pour que ce soit vendredi tous les jours de la semaine. Désormais, un bon musulman s'apprécie à son accoutrement et à son enthousiasme pour la collectivisation des prières. La réconciliation, c'est encore la presse saoudienne qui fête le retour des prisonniers de Guantanamo comme des libérateurs. En attendant les locaux commerciaux et les pensions d'invalidité. Il nous restait un peu d'espoir avec nos voisins de l'est et de l'ouest mais il semble que là aussi tout soit joué. La Tunisie prospère, certes, mais à l'ombre d'un "Muawiyaa" plébiscité par toutes les chancelleries. Les droits de l'homme? Vous n'y pensez pas? Et d'ailleurs, les droits de l'homme, c'est un pléonasme dans le monde musulman. Ceux qui ont codifié notre religion ont tout prévu; alors, évitons de cogiter à leur place. Cessons de vouloir comprendre. "Ma thawasch tafhem" ! (Ne cherche pas à comprendre). C'est notre formule magique, celle par laquelle nos geôliers ont fermé les portes de l'Idjtihad. "Ma thawasch tafhem", c'est l'argument massue ou matraque de l'agent de police qui vous retire les papiers de votre voiture. C'est le premier article non écrit de toutes les constitutions à l'usage des potentats "démocratiques". Il faudra vous en souvenir lorsque vous irez voter pour la nouvelle Constitution. Chez nos amis marocains, l'espoir était encore plus grand et aussi bien entretenu par les médias d'outre-mer. Le nouveau roi a d'abord apporté quelques retouches libérales au statut de la femme. Par atavisme, les islamistes du coin ont élevé des protestations véhémentes tout en sachant que l'essentiel était sauvegardé. Ce mois-ci, la polémique a rebondi à l'occasion de la promotion de cinquante jeunes femmes en qualité de "mourchidates" (guides spirituelles, aumônières). Etait-ce un premier pas vers le droit pour les femmes de diriger la prière collective? Que non, a répliqué le ministre marocain des Affaires religieuses. Il n'y a pas et il n'y aura jamais de femmes-imams dans notre pays, a-til asséné. Et de refiler le brûlot au "Haut conseil scientifique (en théologie)", que préside le Roi Mohamed VI en personne. Samedi dernier, la "fetwa" a été proclamée et le Haut conseil a confirmé: aucune femme ne dirigera la prière sous le ciel du Maroc. A noter que la "fetwa" se réfère au rite malékite, pris lui aussi dans les turbulences de la réconciliation. Voilà les Marocaines rassurées sur leur avenir, à la veille de la fête de Mères. Le mouvement islamiste "Al-adl oual ihsane", présent au Parlement, qui a protesté contre la nomination des cinquante "mourchidates" pour la forme, n'a pas encore réagi. L'hebdomadaire "Al-Ahdath-Al- Maghribia" nous apprend, cependant, que ce parti a une conception particulière de la fonction parlementaire. La semaine dernière, les députés islamistes ont provoqué un chahut dans les travées pour empêcher le ministre, chargé des Relations avec le parlement, d'être entendu. La télévision a du interrompre la retransmission en direct de la séance qui a été levée, peu après, dans le désordre. Il s'agissait tout simplement d'empêcher l'orateur d'exposer le genre de questions écrites que posent les élus islamistes au gouvernement. Selon l'hebdomadaire marocain qui a interrogé le ministre chahuté, les questions posées au gouvernement relèvent surtout de l'intermédiation, du népotisme et du clientélisme. Il ne s'agit pas pour ces députés de contrôler le gouvernement mais d'obtenir des faveurs pour leurs proches ou pour leurs électeurs. On retrouve ainsi des questions tout à fait saugrenues comme celle du député Lahbib Shoubanide au ministre de la Justice. Il s'agit d'une femme qui se plaint de la dépravation des mœurs sexuelles de son mari qui accuse, en retour, son épouse d'infidélité. Le ministre de la Justice est sommé, aux termes de cette missive, de réhabiliter cette dame (!!!). On peut, évidemment, imaginer tous les scénarios possibles et imaginables, pour peu qu'on ait l'imagination un peu fertile. Mais souvenez-vous : évitez de trop chercher à comprendre. Et si vous cédez à la tentation, faîtes le en silence et en cachette, dans les règles de discrétion et de la "Hichma" (pudeur). C'est au nom de la "Hichma", d'ailleurs, que l'actrice égyptienne Hanane Turk a annoncé, à grand renfort de publicité, sa décision de porter le hidjab. Ce qui a amené notre confrère Mohamed Abderrahmane à se pencher, dans le magazine "Elaph", sur le phénomène du hidjab en milieu artistique. Il note d'abord l'ampleur exagérée des réactions par rapport au fait lui-même, en particulier sur les sites Internet. "Partout, on congratule et on félicite Hanane et les écrans des ordinateurs ont failli exploser en "you-you" à la lecture de la nouvelle. C'est comme si Hanane avait proclamé sa conversion à l'Islam, comme si le seul hidjab de Hanane signifiait la fin des problèmes de l'"oumma" et le triomphe de l'Islam.90% des admirateurs de l'actrice qui aimaient tous ses films, y compris les plus controversés, ont approuvé sa décision. L'effet troupeau (moutons de Panurge) a donc encore agi en plus du fait que chacun de ces admirateurs souhaitait que leur actrice préférée se mette sous hidjab, ainsi que toutes les autres. Ceci, pour une raison bien simple: de par leur nature, les Egyptiens ne peuvent pas dire non à toutes les formes de la pratique religieuse. C'est un point fondamental dans la relation que les Egyptiens ont eu, de tous temps, avec l'artiste. On ne peut pas nier que jusqu'à aujourd'hui, il y a des gens qui ne respectent pas l'artiste même s'ils vont le voir au cinéma. Il y en a qui applaudissent lorsque les artistes ont des problèmes et qui ne croient pas que les baisers échangés à l'écran soient du cinéma. Jusqu'à présent, il y en a qui n'admettent pas que la grande majorité des musulmans croient que le hidjab est une obligation même s'ils ne s'y soumettent pas. Nombreux sont ceux qui ont considéré le hidjab comme une victoire de l'Islam dans sa bataille contre l'Occident. A l'opposé, des insatisfaits ont brandi l'argument selon lequel la foi est une affaire de cour et non pas de coiffe sur les cheveux. Ils affirment que le hidjab constituait un retour en arrière pour l'Egypte. Comme si le pays était engagé dans un bond en avant et que la décision de Hanane avait brisé cette volonté de rénovation". Bref, un débat qui n'en finit pas même s'il tourne de plus en plus en faveur des islamo-hidjabistes. En ce qui la concerne, l'écrivaine saoudienne Ala Al-Hadhloul a tranché. Elle a provoqué un mini esclandre l'année dernière, au salon du livre de Ryadh, en refusant de se couvrir les cheveux. Dans une interview à "Elaph", elle raconte qu'au moment de la vente- dédicace de son roman, "Le suicide stipendié", un "cheikh" les a accostés, elle et sa sœur, en criant:" Dieu, bâillonne-les avec un bâillon de feu !". Tout ça, parce que les cheveux sont source de "fitna" à l'exclusion de tout le reste.A. H.
Le soir d'Algérie Ahmed Alli http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2006/05/29/article.php?sid=39027&cid=8
jeudi 30 novembre 2006
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